Le verbe rasha nest pas très fréquent dans la Bible. On le rencontre 34 fois :
Les dérivés du verbe sont plus fréquents. On peut en distinguer trois :
[Jérusalem] a contesté mes commandements jusquà « se rendre plus coupable » que les nations [ ] qui lentourentDe même que limpiété rèsha soppose à la justice çèdèq, limpiété rishah soppose à la justice çedaqah.
Le nom féminin nayant pas de pluriel, les difficultés surgissent avec le pluriel du masculin. Car le masculin rèsha (une impiété) et ladjectif substantivé lui aussi masculin rasha (un impie) ont tous les deux le même pluriel : reshaïm. Ce qui pose un problème de lecture à chacune de ses occurrences : sagit-il des impiétés ou des impies ? des méchancetés ou des méchants ?
On compte 129 occurrences de ce pluriel, sensiblement la même fréquence quau singulier. Dans la plupart des cas, le contexte impose de lire le sens « impies », car la lecture « impiétés » serait aberrante. Mais lorsquelle a un sens, il est frappant de constater que cette lecture nest retenue par aucun témoin. Le dictionnaire des concordances de S. Mandelkern (1895) classe les 129 occurrences du pluriel à la rubrique impies, la rubrique impiétés étant entièrement vide.
Cette classification ne fait que refléter la lecture des traditions les plus éminentes (Septante, Targum, Vulgate) comme des traductions les plus récentes ; à les suivre, on serait tenté de croire que la Bible ne sintéresse quaux « méchants », ignorant tout des vilenies (« méchancetés ») dont ceux-ci se rendent coupables. En vérité, cest tout le contraire : Dieu condamne le péché, non le pécheur dont il attend quil se convertisse. Mais les hommes sont faibles, même lecteurs assidus de la Bible ; alors que celle-ci nous guide en nous montrant les fautes à ne pas commettre, ils préfèrent se substituer au Juge et ny voient que des coupables à dénoncer.
Dans les traductions présentées ici, on a pris le parti opposé à cette lecture trop systématique. Chaque fois quil est possible, sans perdre en clarté du texte, de comprendre « actions » plutôt que « acteurs », on a traduit reshaïm par malveillances ou impiétés, quitte à jouer sur la polysémie de certains mots du contexte sil en résulte une lecture plus éclairante. La qualité spirituelle du texte hébreu sen trouve fréquemment enrichie, notamment dans les Psaumes, qui contiennent à eux seuls le tiers des occurrences de ce mot.