Au sens strict, la Torah désigne lensemble des cinq premiers livres de la Bible : le Pentateuque (Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome), encore appelé « loi de Moïse ». Au sens large, et plus tardivement, la Torah comprendra aussi les Prophètes (nebyim) et les autres Écrits (ketoubim), cest-à-dire la totalité des vingt-quatre livres du canon juif : la Torah, cest la Bible hébraïque (les textes grecs, et notamment les évangiles, ajoutés à la Bible par les chrétiens, ne font pas partie de « la Bible » au sens où nous lentendons ici). Mais dans les textes hébraïques eux-mêmes, cest presque toujours le sens restreint du mot torah qui prévaut, le mot étant souvent précisé : torah de Moïse.
Linfluence de la traduction grecque, nomos, a conduit la plupart des auteurs à traduire torah par « loi », ce qui donne limpression (erronée) que la torah est à caractère juridique. Nous préférons employer le mot « Parole » lorsquil sagit du contenu spirituel, et « Bible » ou « Livre » lorsquil sagit du texte. Dans certains cas, il sera difficile de discerner lun de lautre, et lon se verra contraint de maintenir le mot torah, sans le traduire ; mais le plus souvent, la distinction est impérative : on dira par exemple la Parole de Yhwh (torat YHWH, la Torah divine, lenseignement de Dieu) et la Bible de Moïse (torat moshè, la torah de Moïse), ou simplement le Livre (séfer ha-torah, le livre de la Torah) ou la Bible.
En choisissant de traduire torah par Parole, nous retrouvons les notions denseignement, dinstruction ou dindication, de direction, contenues dans la racine yarah du mot torah et qui en éclairent le sens. La Torah apparaît mieux à celui qui cherche Dieu comme une réponse divine à ses interrogations, réponse qui va bien au-delà du contenu du livre de la torah de Moïse ; il peut alors recevoir lÉcriture comme une nourriture spirituelle, et en vivre. Labandon du mot « Loi » nous éloigne de ce travers si humain, qui consiste à ne voir dans la Parole de Dieu quune contrainte arbitraire et pesante, alors quil sagit de laide la plus sûre.
Enfin, le passage du vocable Torah à celui de Parole redonne au mot, en sappuyant sur le sens de la racine, sa valeur universelle de nourriture divine, non réservée au juif mais offerte à tout chercheur de Dieu. Car si cest bien le Juif, le peuple juif et non le juif croyant, qui reçoit et transmet lÉcriture, celle-ci est destinée à tous les hommes ; lÉcriture, en hébreu la torah de Yhwh, est Parole de Dieu universelle, mais non la torah de Moïse qui nen est que le support culturel entré dans lHistoire avec lExode du peuple élu.